Berthe Morisot, une pionnière conformiste
Una vita nel conflitto fra emancipazione e morale sociale
1869, huile sur toile, Washington DC, National Gallery of Art
Pour les 150 ans de l’impressionnisme tous les musées ont organisé des expositions pour fêter l’évènement. En Italie surtout, deux manifestations se poursuivront jusqu’à l’année prochaine. À Gênes, le Palais Ducal accueille jusqu’au 23 février « Impression, Morisot » et à Turin la Gam accueille jusqu’au 9 mars « Berthe Morisot. Pittrice impressionista ». Rappelons au passage que la première grande rétrospective consacrée à cette artiste a eu lieu à Paris au Musée d’Orsay en 2019.
Mais pourquoi cet engouement pour une femme qui, de son vivant, n’a attiré l’intérêt de la critique que pour des attaques personnelles ?
Charles Leroy, le journaliste qui a « inventé » le mot impressionnisme dans le célèbre article où il ridiculise le mouvement, écrit au sujet de Berthe Morisot : « Lorsqu’elle a une main à peindre (La lecture), elle donne autant de coups de brosse en long qu’il y a de doigts, et l’affaire est faite. Les niais qui cherchent la petite bête dans une main n’entendent rien à l’art impressif et le grand Manet les chasserait de sa république. »
Ce qui est curieux c’est que, sans le savoir, il associe les deux artistes qui étaient liés par une forte amitié personnelle, si ce n’est plus. Le coup de foudre s’était produit au Louvre, où Berthe Morisot étudiait et copiait les grands maîtres et qu’Édouard Manet fréquentait aussi. Estime, « fascination réciproque et jeux d’influences », comme le précise l’intéressante vidéo du Musée d’Orsay, (Berthe Morisot, l’indépendante - #CulturePrime) ont eu une grande place dans leur vie. Berthe Morisot, aux grands yeux, « verdâtres » selon Paul Valéry, était devenue la muse inspiratrice de Manet qui lui consacra 14 portraits. Elle-même devrait avoir fait 6 autoportraits dont trois perdus et un seul qui la représente en tant que peintre. Mais, insatisfaite de son travail, elle roula la toile en l’abandonnant dans une armoire où elle fut retrouvée après sa mort.
Quant au rapport qui la liait à Edouard Manet, celui-ci étant marié, Berthe dut donner une autre orientation à sa vie. Elle abandonna ses chimères pour rentrer dans la vie réelle, comme elle avouera plus tard, et épousa Eugène Manet, le frère de l’artiste, qui la courtisait discrètement et fit tout son possible pour promouvoir ses œuvres.
Cette situation complexe et difficile nous renvoie au destin tragique d’une autre femme artiste, Camille Claudel, dont la passion pour un homme marié, Auguste Rodin, l’amena à l’autodestruction et à la folie. Berthe Morisot, par contre, est une femme bourgeoise qui, bien que révolutionnaire dans l’art, est la seule artiste qui expose ses toiles au Salon de 1874 tout en restant très attachée aux conventions sociales de son époque. Une personnalité qui vit des conflits et des contradictions qui l’amènent de temps en temps à craindre pour sa renommée tout en étant convaincue de sa valeur artistique. « Je n'obtiendrai [mon indépendance] qu'à force de persévérance et en manifestant très ouvertement l'intention de m'émanciper », écrit Berthe Morisot en 1871.
Referenze iconografiche: Courtesy National Gallery of Art, Washington